⏱️ Temps estimé pour la lecture de cet article : 5 minutes.
Soyons classiques, et parlons de vos débuts pour commencer. Qu'est-ce qui a amené l'étudiant en communication visuelle à dessiner de la bande dessinée ?
La passion sans doute avant tout. Une pulsion. Pour remettre les choses dans l'ordre, j'ai suivi un cursus de communication visuelle pour me rapprocher de tout ça et pas l'inverse. Jeune aspirant en illustration, ma famille m'a poussé avec bon sens à m'assurer d'obtenir un diplôme et des compétences qui me permettrait de gagner ma vie. Donc c'était un choix plus sécurisant rapport au monde de l'illustration et de la bande dessinée qui semblait bien plus rude, difficile à accéder et aléatoire.
Comment décide-t-on un jour, de devenir graphiste dans les jeux vidéos ? Un hasard, une volonté farouche ?
Une part de hasard pour moi. En fait, môme, j'avais passé du temps sur de vieux logiciels préhistoriques à essayer de composer des visuels en pixels. Mais j'avais complètement perdu de vue l'univers du jeu vidéo, moi-même très peu joueur à cette époque. Je focalisais alors uniquement sur l'illustration, le graphisme et à moindre degré la bande dessinée. C'est au cours d'un salon de jeux de rôles ou je présentais mon book et mes travaux que j'ai rencontré un designer de jeux, John MacCambridge qui est devenu un ami proche par la suite. J'ai ainsi réalisé que tous les jeux vidéo nécessitaient un travail de conception visuelle en 2d avant tout. Je me suis engouffré dans la brèche et j'ai fait mon chemin dans cet univers passionnant, par étapes et petit à petit. Pour mon premier job (un jeu ludo historique sur l'Egypte), je dessinais des décors historiques sur papier, au feutre, ainsi que des plans millimétrés, sans savoir comment scanner un visuel.
Et comment avez-vous approché l'univers des jeu de rôles, vous qui dites ne jamais avoir joué à un de ces jeux ?
Sans doute par le biais des illustrations. Si je ne suis pas joueur, j'étais grand amateur de la plupart des visuels de ces jeux : fantastiques, SF, horreur, des images qui me faisaient rêver et comblaient mon imaginaire. C'est tout naturellement que dans un premier temps j'ai démarché avec mon book les maisons d'éditions de jeux. Et encore une fois j'ai commencé timidement pour ensuite surfer sur une sorte de dynamique exponentielle. De plus en plus de jeux, de magazines, créa françaises (C.O.P.S.) pour ensuite travailler pour les plus gros jeux US, des licences énormes (Magic : The Gathering, Vampire : The Requiem, World of Warcraft,, Horrorclix, Dreamblade, Warmachines…)
Vous avez commencé la Bande Dessiné en remplaçant au pied levé un autre auteur. Etait-ce sur l'adaptation d'Alone in the Dark, ou sur un autre projet ?
Effectivement sur celui-ci. J'avais auparavant juste réalisé des histoires courtes pour me faire la main et mon book comportait certaines planches. C'est Thierry Mornet, maintenant éditeur chez Delcourt qui m'avait sollicité pour remplacer au pied levé un dessinateur US qui se désistait sur le projet. Des conditions rudes (une deadline de folie) mais une très bonne expérience qui m'a permis également de travailler avec les Frères Péru à la couleur, également à leurs débuts à cette époque.
Pourriez vous raconter à nos lecteurs comment vous est revenu le projet Spawn Simonie ?
Toujours dans la même continuité, si je ne suis pas trop fier artistiquement de ce projet Alone In The Dark (j'étais jeune ;), ça m'a néanmoins permis de prouver qu'en matière de Bande dessinée, je pouvais être efficace et répondre à une deadline serré style comic-books. De plus mon book s'était étoffé avec des travaux d'illustrations de meilleure qualité. C'est toujours Thierry Mornet, secondé par Jeff Porcherot qui avait initié le projet en démarchant Todd McFarlane, appuyé d'un pitch (Jeff Porcherot et Alex Nikolavitch, le scénariste) et d'exemplaires de mon travail. Mon style et mes affiliations avec les univers « dark » semblaient faire de moi un bon candidat. McFarlane et son équipe ont suffisamment apprécié mes travaux pour me confier les rênes graphiques du projet. Ensuite il a fallu embrayer ;)
Lorsqu'on rencontrait la SEMIC team en festival, il y avait une belle cohésion qui se dégageait. Etait-ce la même chose vu de l'intérieur ? Gardez vous des contacts avec les membres de la SEMIC Team, auteurs ou membres du staff ?
Il y avait effectivement un aspect familial, qui dépassait de loin la structure éditoriale elle-même. Beaucoup de rencontres s'étaient faites avant (sur des fanzines, festivals) et ont depuis perdurées. Chacun a fait son chemin et c'est assez fun de recroiser pas mal de gens de cette famille maintenant qui ont tous pour la plupart fait leurs noms dans le domaine de la BD, que ce soit des auteurs ou éditeurs. Et effectivement on se revoit souvent, pour certains hors contexte professionnel (j'entends par-là aller boire des verres ;)
Avoir Todd McFarlane sur son CV, est-ce payant, lorsqu'on vise le public américain ?
Oui ça doit sans doute aider mais ce projet était un parmi de nombreux autres. J'ai travaillé sur différents fronts : Jeux vidéos, illustrations de livres, de jeux de cartes. Pas mal de joueurs de Magic ne connaissent que mes travaux d'illustrations, idem pour le public comics. D'autres ne connaissent sans doute que mes participations BD chez Soleil (Légendes de la Table Ronde) par exemple et peut-être que certains ne me voit que comme designer de jeux vidéos (ColdFear, Splinter Cell : Double Agent, Dungeon Runners, Haze..). Comme je le disais je vois ça comme une dynamique logique et sereine qui s'est développé avec le temps. J'ai beaucoup travaillé, sur de nombreux projets, dans des domaines liés par l'image mais bien différents en soi, et qui m'ont tous amené de nouveaux projets de plus grosse visibilité dans chaque domaine.
Comment vous êtes vous retrouvé à être le cover-artist de la série Annihilation Conquest, pour Marvel Comics ?
Une sollicitation par mail, comme la plupart du temps pour me demander si je serais intéressé pour réaliser des couvertures pour Marvel. J'ai découvert ensuite sur le net qu'un chercheur de têtes de Marvel avait présenté mes travaux au staff éditorial dont certains connaissaient mes images. Ca leur a apparemment beaucoup plus et voilà. « Ca vous dirait de réaliser des couvs Marvel ? -auphecourse ! J'ai commencé à dessiner en recopiant les X-men ! » Pour la petite histoire je m'attendais à une ou deux couvertures d'essai mais il s'agissait de 19 couvertures à la base. Pour des raisons de plannings et d'autres engagements je ne réaliserai dans un premier temps que 7 couvertures. On verra ensuite au terme de cette première collaboration…
Que savez vous de cette saga ? Avez-vous des éléments de scénarii à votre disposition, ou bien Marvel vous donne-t-il le thème de la couverture simplement ?
J'ai lu après coup la saga précédente Annihilation, pour me mettre au parfum et trouver le bon feeling. L'éditeur Bill Rosemann qui coordonne tout ça fait un superbe boulot de communication entre tous les intervenants. Il nourrit la machine. Pour la première couverture que j'ai réalisé pour le prologue, il m'a spécifié un maximum d'intention (un feeling Jeanne D'Arc dans l'espace, dimension cinématographique et épique…) en me fournissant des designs maisons (dont les nouveaux travaux de Marko Drudjevic, fantastique nouveau cover artist Marvel, que je connaissais d'ailleurs auparavant, du monde du jeu vidéo), des pages en cours et de nombreuses réflexions et pistes de travail.
Allez vous gérer ce travail depuis la France, où envisagez vous de rejoindre les USA ?
Comme pour tous mes travaux quel qu'ils soient, je travaille dans mon propre studio à Paris, à distance, l'essentiel des communications ayant lieu par e-mails ou discussions MSN. Pour certains travaux de concept jeux vidéo il m'est arrivé de me déplacer, ce qui est en général une super opportunité de voyage ;)
Etes vous plutôt album librairie, ou mensuel kiosque, dans vos lectures comics ? Peut-être êtes vous plutôt VO ? Quel lecteur de comics êtes vous ?
Un peu de tout, VO surtout. Quand il s'agit d'un travail littéraire un peu complexe, j'ai un peu peur de perdre certaines subtilités donc je reviens sur la VF. J'aime les graphismes léchés mais ce qui m'importe le plus en lecture BD, c'est l'histoire. Ca nourrit une grosse réflexion sur mon travail BD, à savoir être efficace et ne pas sombrer dans le défaut de l'illustrateur qui se met à la BD, peaufine ses images mais devient chiant à lire…J'y travaille encore et peut-être un jour me faudrait t'il plancher sur une histoire uniquement en N&B, avec économie de moyens graphiques, juste en focalisant sur la narration.
Pour l'heure je clos un nouveau Graphic Novel « Spawn : Architects of Fear » pour Todd McFarlane Productions (sortie prévue en septembre aux USA). Le scénariste est Arthur Clare, avec qui j'ai une relation de travail privilégiée, à base d'échanges incessants. Ca m'a amené à contribuer un peu à l'histoire ou en tout cas à son développement. Pour l'heure j'espère que ce sera mon travail le plus abouti et poussé en comics. Brian Haberlin, le rédacteur en chef de TMP (et nouvel artiste du comic-book Spawn mensuel) croit beaucoup dans le projet et nous épaule grandement. J'espère qu'on sera proches au final de nos intentions de départ.
Explorez les dernières offres spécialement sélectionnées pour vous. Profitez de prix exclusifs sur une sélection de produits populaires !
Nous vous conseillons aussi la lecture des sites suivants :
Interview réalisé pour Marvel World par Yaneck Chareyre (Winter-Guard).